20/04/2010

Lettre de Chantal Umuraza

St. Donat, le 02 avril 2010

Chers amis,

A l’heure où j’écris ces mots, je pense aux Rwandais qui vivaient dans la crainte de se faire tuer, quelques jours avant le 06 avril 1994, qui subissaient déjà l’humiliation, l’oppression et d’autres horreurs. Comme si la souffrance n’était pas assez dense, dés le 07 avril, c’est la vie qui s’arrête pour beaucoup. Pendant les 100 jours du Génocide contre les Tutsi, tout arme qui peut tuer a été utilisée, pour éliminer, tous : femmes, hommes, enfants, malades, vieillards.
On nous dit qu’il y a eu 1 million de morts. Moi, j’ai toujours peur qu’ils aient oublié quelqu’un. La chasse à l’homme, les cachettes, la mort, la peur, le sang, les plaies, la pluie, la faim, les larmes, l’angoisse, l’incertitude, tout se mélange.

Pour ceux qui ont survécu, la vie continue. Mais comment? Après cette folie humaine ?
Beaucoup ont pu partir ailleurs pour se reconstruire, certains écrivent, témoignent, racontent pour expliquer, pour avancer. Nombreux sont ceux qui sont isolés, dans l’oubli, seuls face aux souvenirs atroces, à leur histoire, à la vie incertaine. Heureusement, il y a les volontés pour soutenir matériellement ou moralement. L’Etat fait beaucoup d’efforts pour faire avancer le peuple et le développement; il existe des associations proches des victimes, qui participent à réconciliation, à la reconstruction, à l’écoute de diverses difficultés, la solidarité peut faire beaucoup pour l’humanité, pour les Rwandais, c’est ce que je crois.

Chers amis, dans ce mois de deuil, j’aimerais penser à mon peuple, à tous sans exception. Pour l’espoir, pour la vie qui continue malgré tout, et je voudrais vous inviter à vous joindre à moi.
Notre pensée sera plus efficace. 3 événements en particulier à ne pas manquer :

Mercredi 21 avril à Espace des Collines à Saint Donat (20h) : projection de film documentaire suivi d’un débat. Entrée 5 € par adulte et 2€ par Etudiant.
Film :D’Arusha à Arusha "Les images de procès encours, archives audiovisuelles…Comment la justice internationale s’exerce-t-elle au-delà de ses fondements politiques ? Qu’est-ce que juger à l’aune d’une conscience universelle ? S’appuyant sur les propres archives du TPIR - Tribunal Pénal International pour le Rwanda, le film met en scène le fonctionnement d’une diplomatie judiciaire".

Vendredi 23 avril à Espace des Collines à Saint Donat (20h) : Une pensée pour le Rwanda, soirée solidaire et conviviale avec musique. Entrée 7 € par adulte et 5 € étudiant et groupe.
Comment et avec qui se réconcilier après un génocide ? Nous allons parler de la réconciliation, de la justice en cours, du rôle important de la femme dans la reconstruction, nous lirons des textes et dirons des mots qui guérissent, en compagnie de Diana une chanteuse de Valence, d’une voix extraordinaire, ses chansons sont en Russe et en Anglais.

Samedi 24 avril à Chatuzange le Goubet dans la maison de la presse ; L’Arc en Ciel, (09-12h) signature de livres : Safari au Rwanda de Marie Paule Richard, une jeunesse rwandaise (mon seul et unique livre, pour le moment) et vente d’artisanat du Rwanda.

Je vous attend nombreux, avec vos familles et amis, car vos regards, vos encouragements et vos partages participent énormément à ma reconstruction, c’est ainsi qu’arrive à soutenir des projets de mon village au Rwanda. La vie continue.

Amahoro

Chantal Umuraza

infos complémentaires
Kigali : Plus de 20% de la population rwandaise portent des signes de traumatisme, dont 50% sont dans la dépression extrême, dues aux effets du génocide de 1994, a déclaré mardi Dr Naasson Munyendamutsa, chercheur à l’Université Nationale du Rwanda.
Munyendamutsa a fait la déclaration lors d’une émission à la radiodiffusion et télévision nationale.

Il a noté que les cas de traumatismes psychologiques sont en augmentation avec des effets variés qui comprennent la dépression psychiatrique, l’abus des drogues et des problèmes cardiaques.

« Avec le temps, les cas de traumatisme semblent changer de signes. Alors que dans les premières années de l’après-génocide, les victimes de traumatismes pouvaient montrer des signes de peur et des signes émotionnels visibles. 16 ans après, les signes sont devenues plus diverses, selon le genre de vie que mène la personne », a noté Munyendamutsa.

Il a ajouté que quelques-uns des nouveaux signes décelés dans certains cas de traumatisme comprennent la dépression, les maladies cardiaques et la toxicomanie.

La plupart des cas de traumatisme se sont intensifiés au cours de la commémoration du génocide de 1994 où la plupart des victimes étaient forcées de revivre les jours d’horreur.

Les cas de traumatisme comprennent les victimes et les auteurs du génocide et, parfois, des gens qui n’ont qu’entendu des histoires sur ce qui s’est passé pendant le génocide.

Selon Dr Munyendamutsa, les cas de traumatisme provoqués par le génocide appellent à des efforts collectifs de tous les êtres humains puisque le traumatisme est causé par des activités humaines.

Mercredi 7 avril, pour la 16ème fois consécutive, le Rwanda va commémorer le génocide durant une semaine de deuil national avec comme activité principale, donner une sépulture descente aux dépouilles des victimes du génocide.

Les activités de commémoration de cette année auront lieu le long des plans d’eau à la mémoire des victimes du génocide qui ont été jetées ou noyées dans l’eau pour que leurs corps puissent être inhumés décemment.

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